Dis moi 10 mots… de Stéphane Mallarmé

affiche francophonie Cette semaine, comme chaque année à la même période, nous célébrons la langue française et la francophonie ! Voici une belle occasion de plonger au cœur de notre langue et de s’attarder sur les mots d’un célèbre poète bourguignon, Stéphane Mallarmé.

Mallarmé, « prince des poètes »

Stéphane Mallarmé est né à Paris en 1842, mais c’est dans l’Yonne qu’il passe une partie de sa jeunesse. Elève au lycée de Sens, il développe un goût précoce pour la littérature et écrit ses premiers textes poétiques à l’âge de quinze ans ! Influencé par Victor Hugo, Théophile Gautier et Charles Baudelaire, le jeune élève apprend l’anglais pour lire Poe dans le texte. En 1863 il devient professeur d’anglais, un travail qui lui permet de vivre, mais guère de s’épanouir.

Manet, portrait de stéphane mallarmé
Portrait de Stéphane Mallarmé, Edouard Manet, huile sur toile, 1876. Musée d’Orsay, Paris. ©RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski

En 1862 Mallarmé publie ses premiers poèmes et rencontre sa future épouse à Sens. Les années 1860 sont une période féconde pour l’écrivain qui rédige ses textes les plus connus : L’après-midi d’un faune, Les Fleurs, L’Azur… Nommé professeur à Paris en 1871, le jeune écrivain perce les milieux littéraires de la capitale. Sa rencontre avec Edouard Manet en 1873 lui ouvre les portes des ateliers impressionnistes. Il se lie d’amitié avec Berthe Morisot et Julie Manet. Les années 1880 marquent sa reconnaissance dans le milieu littéraire. Il devient même le représentant de la littérature décadente avant d’être désigné chef de file du mouvement symboliste. Rejetant le réalisme de l’époque, il construit son langage poétique en usant de symboles et d’analogies pour dépasser la réalité visible par l’évocation d’idées abstraites et d’états d’âmes. Il devient « le prince des poètes » et reçoit l’élite intellectuelle de son temps dans son salon parisien du mardi.

Les poèmes-éventails

Durant les quinze dernières années de sa vie, Mallarmé produit un art original en inscrivant ses poèmes sur des éventails. Généralement destinés aux femmes qui l’entourent, ces poèmes courts mais ciselés sont dits « de circonstances », car offerts à des moments particuliers de la vie.

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Autre éventail de Mademoiselle Mallarmé, Stéphane Mallarmé, vers 1884, Coll. Musée Départemental Stéphane Mallarmé, Vulaines-sur-Seine. © Y.Bourhis DAPMD/CG77 – D.R.

L’éventail qu’il offre à sa fille Geneviève vers 1884, alors que la demoiselle est âgée d’une vingtaine d’années, est l’un de ses chefs d’oeuvre selon Paul Valéry. Le poème évoque toute l’affection de l’écrivain pour sa fille, avec qui il est très complice, et le passage de la jeunesse à l’âge adulte. Il faut dire que Mallarmé a toujours vécu entouré de femmes et semble fasciné par leur univers. Ici le fond poétique de l’oeuvre rejoint la forme délicate de l’éventail, accessoire féminin par excellence, indispensable compagnon des toilettes de l’époque.

Autre éventail de Mademoiselle Mallarmé, Stéphane Mallarmé

O rêveuse, pour que je plonge Au pur délice sans chemin, Sache, par un subtil mensonge, Garder mon aile dans la main. Une fraîcheur de crépuscule Te vient à chaque battement Dont le coup prisonnier recule L’horizon délicatement. Chaste jeu ! voici que frissonne L’espace comme un grand baiser Qui, de n’être éclos pour personne, Ne peut jaillir ni s’apaiser. Sens-tu le paradis farouche, Ainsi qu’un rire enseveli, Se couler du coin de ta bouche Au fond de l’unanime pli ! Le sceptre des rivages roses Stagnants sur les soirs d’or ! ce l’est, Ce blanc vol fermé que tu poses Contre le feu d’un bracelet.

Geneviève Mallarmé, Nadar, 1900
Geneviève Mallarmé photographiée par Nadar vers 1900

Voici un poème dont les mots, précis, riches et évocateurs, nous happent. Au delà des mots, ce sont des odeurs, des couleurs, des textures et même la chaleur que nous évoquent ces vers.

Le livre en Bourgogne

Célébrer la langue française, les mots et les écrits, revient à s’intéresser à la filière du livre en Bourgogne. En effet les industries culturelles subissent depuis plusieurs années déjà la concurrence d’internet, du livre numérique, mais également le poids des mutations économiques, sociales et culturelles qui modifient les pratiques liées au livre et à la lecture qui ne cessent de baisser. Selon une récente étude, la Bourgogne regroupe 124 librairies et plus de 800 bibliothèques publiques ! En amont, les auteurs sont nombreux dans la région, et l’on trouve également plusieurs dizaines de maisons d’éditions, mais peu vivent uniquement des revenus de leurs activités littéraires ! Alors lisons, et soutenons la filière du livre !

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Le marché aux livres à Cuisery (71), labellisé Village du livre.

Les villages du livre en Bourgogne

Signe de l’attachement de la région à son patrimoine littéraire et à la nouvelle création, la Bourgogne compte deux villes labellisées « Village du livre ». La Charité-sur-Loire dans la Nièvre et Cuisery en Saône-et-Loire regroupent chacune une quinzaine de professionnels du livre (libraires, bouquinistes et artisans des métiers du livre) qu’elles ont décidé de mettre en avant par une programmation culturelle tout au long de l’année. Le village de Cuisery propose ainsi des animations pour le Printemps des Poètes, une foire aux livres et un concours de nouvelles. La Charité-sur-Loire s’est fait connaître par son festival du mot organisé chaque année à la fin du mois de mai. Pendant cinq jours, tous les arts sont conviés pour célébrer la langue française. La ville organise également durant l’hiver un marché aux livres le troisième dimanche de chaque mois. Le centre culturel de rencontre actuellement en création aura pour but de prolonger le festival tout au long de l’année par différentes actions. Une balade des mots a même été mise en place. Sur les murs de la ville ou sur les vitrines des commerces, des citations d’écrivains de tous horizons ont été inscrites.

balade des mots
Une citation au détour d’une rue de La Charité-sur-Loire (58), Cité du mot.

Dis moi Dix mots

Chaque année le Ministère de la Culture met en avant 10 mots lors de la semaine de la francophonie. 10 mots auxquels on prend le temps de s’intéresser et de réfléchir en découvrant leur origine mais aussi leurs différents sens. En vous rendant sur le site vous pourrez découvrir cette année comment « amalgame » est un mot qui nous vient directement des alchimistes médiévaux, très utilisé aujourd’hui dans le langage politique, que « sérendipité » tire son inspiration d’un conte oriental, ou encore que le verbe « cibler », qui provient de l’univers des jeux d’adresse, s’est inspiré des stratégies de la guerre pour s’appliquer aux actions de publicité !

http://www.dismoidixmots.culture.fr

Et vous, dites-moi un mot que vous aimez !