
Une exposition-dossier
Depuis un an, les musées d’Art et d’Histoire d’Auxerre ont entrepris de mettre en valeur les oeuvres habituellement peu exposées au public par de petites, mais fort intéressantes, expositions-dossiers. Dans cette nouvelle exposition temporaire sise dans le Logis de l’Abbé de l’Abbaye Saint Germain, « Quand l’enfant paraît », c’est la place de l’enfant dans l’art et dans la société qui est examinée.
Le statut de l’enfant
« Lorsque l’enfant paraît, le cercle de famille Applaudit à grands cris. Son doux regard qui brille Fait briller tous les yeux, Et les plus tristes fronts, les plus souillés peut-être, Se dérident soudain à voir l’enfant paraître, Innocent et joyeux. »
La première strophe de ce poème de Victor Hugo publié en 1831 dans le recueil Les feuilles d’automne, et qui a inspiré le titre de cette exposition, n’a pourtant pas toujours été le reflet de la place des enfants dans la société. En effet, chaque époque posa son propre regard sur l’enfance. Les peintres, sculpteurs et graveurs furent les témoins de cette évolution dans leur art…
Oeuvres choisies
Les musées d’Auxerre ont puisé dans leurs collections de quoi illustrer le thème à différentes époques, sans toutefois l’épuiser. On y découvre avec émerveillement de belles toiles, des œuvres attribuées à de grands maîtres tels Emile Bernard ou encore Elisabeth Vigée-Le Brun, connue pour être l’une des premières femmes artistes professionnelles au XVIIIè siècle. On peut également y admirer deux œuvres d’Eugène Carrière, le peintre de l’enfance par excellence sous la IIIè République ! Quelques pièces touchantes rappellent l’intimité du thème, comme ce rare biberon gallo-romain en terre cuite ou ces quelques pièces de vaisselle à jouer en grès.

Quelle place pour l’enfant ?
Au Moyen Age
Longtemps, l’importante mortalité infantile et en couche conféra un statut à part au jeune enfant auquel on s’attachait peu avant qu’il n’ait atteint une certaine résistance physique. Dès lors, il constituait une force de travail. L’enfant ne possédait pas de statut particulier, il était plutôt considéré comme un petit adulte. Dans l’art médiéval, la représentation de l’enfant fut presque exclusivement réservé à l’Enfant Jésus et empreinte de religiosité. L’image de l’enfant était alors soumise aux codes de la peinture religieuse et ne reflètait pas sa place réelle dans la société.

A la Renaissance
Il fallut attendre la Renaissance et les penseurs humanistes pour que l’on s’intéresse véritablement à l’enfant dans lequel on perçut alors un être à part entière. L’éducation des princes devint une priorité et un luxe des milieux aisés mais concerna surtout les garçons ! Le portrait d’enfant devint un genre en vogue dans la noblesse. Les jeunes princes de toutes les grandes familles européennes posèrent face aux peintres. Loin d’être réalistes, ces tableaux avaient pour vocation de présenter la descendance et d’attester des capacités à gouverner. L’enfant est perçu comme le maillon d’une lignée.
A l’époque moderne
Les sciences de l’éducation naquirent à l’époque des Lumières sous l’impulsion de grands penseurs tels Jean-Jacques Rousseau, et grâce à la réunion de plusieurs facteurs. La baisse des naissances, les progrès de l’hygiène et de la médecine, le recul de la mortalité infantile, le développement de la bourgeoisie lié à l’essor économique favorisèrent l’émergence de l’idée que l’enfance est une période privilégiée dans la vie des individus. Rousseau loua les qualités naturelles des enfants à leur naissance, et encouraga à les développer par une éducation adaptée et moins punitive destinée à favoriser leur épanouissement. Cependant, jusqu’au XIXè siècle, en pleine Révolution industrielle, l’enfant des catégories modestes et pauvres représentait une main d’oeuvre peu couteuse qui fut largement utilisée dans les mines et les usines.

Dans le Paris du baron Haussmann, en cette seconde moitié du XIXè siècle, les jeux d’enfants dans les nouveaux parcs de la capitale, lieux de confort, de respiration et d’hygiène dans la ville moderne, ainsi que les balades des nourrices firent l’objet de toutes les attentions des peintres ! La troisième république (1870-1940) est souvent associé à la reconnaissance du statut juridique de l’enfant avec l’instauration de l’école laïque obligatoire en 1882 par la loi Jules Ferry. L’école de la République doit garantir l’accès aux enfants de tous les milieux à une instruction commune. A partir de 1841, le travail des enfants fut réglementé, pour protéger les plus jeunes. La première loi fixait l’âge minimum du travail à huit ans et le limitait à douze heures par jour. L’âge légal sera progressivement repoussé jusqu’en 1959 où il fut fixé à seize ans ! Plusieurs types d’enfants firent leur apparition en peinture : l’enfance laborieuse des rues ou au travail, et l’enfant choyé des milieux bourgeois, entre solitude et amour maternel, constituèrent des figures récurrentes des tableaux impressionnistes.

Au XXè siècle l’enfant acquit un statut privilégié et fit l’objet de toutes les attentions dans les foyers. L’amour maternel est alors loué par la société et érigé en exemple d’éducation. Françoise Dolto ou Philippe Ariès ont contribué au développement de la pédopsychiatrie et d’une science de l’enfance approfondie. Aujourd’hui encore, la famille est au cœur des enjeux de société et l’enfant est devenu roi !

« Quand l’enfant paraît » Exposition temporaire du 24 janvier au 2 mars 2015 au Logis de l’Abbé à l’Abbaye Saint-Germain d’Auxerre. Visite gratuite du mercredi au dimanche, de 14h à 17h.
A visiter en famille !
Voici une exposition qui semble bien attirante et dont je n’avais pas entendu parler ! Merci de l’info , je vais aller faire une visite
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Article qui donne vraiment envie d’aller voir cette exposition qui est très intéressante!
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